Cécile Y. (Ivoirienne bloquée au Maroc) : « Sur 30 personnes, nous ne sommes que quelques survivants ici »


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Par Coulibaly Chigata L.
Mis à jour le 2021-05-15 20:21:24

L´Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) chiffre entre 10.000 et 20.000 les migrants clandestins pour l´Europe qui passent chaque année par le Maroc. Et dans bien des cas, l´OIM signale que le transit se transforme en séjour forcé plus ou moins long. C´est le cas de Cécile Yao, ancienne étudiante dans une grande école à Abidjan, qui se retrouve coincée au Maroc. Elle a accepté de témoigner depuis le Royaume chérifien, pour « Le Communicateur » de l´STC-polytechnique. Interview.


Comment êtes-vous arrivée au Maroc et en quelle année ?

Cécile Y. : Je suis allée au Maroc de façon normale avec un billet de tourisme de trois mois, en décembre 2018. Au départ, j’étais allée au Maroc pour une semaine. Je voulais savoir comment les choses se passent ici puisque je voulais traverser. J’avais un ami qui devait m’aider. Mais à la dernière minute, il ne répondait plus au téléphone. Il m’a dit plus tard qu’il avait été déporté. Donc il avait perdu son téléphone portable.

Que s’est-il donc passé à votre arrivée au Maroc ?

CY : Le billet pour aller était de 250.000F normalement. Mais celui qui était l’ami de mon père, qui devait m’aider et chez qui j’allais séjourner, a pris 1 000 000 de FCFA avec nous. Et une fois chez lui, les choses ont dégénéré. Il n’avait pas de femme donc il voulait de moi et j’ai refusé. Et je suis partie de chez lui. Je suis allée dans la rue où j’ai passé deux jours à dormir à la gare du train. Ensuite j’ai rencontré une amie sur Facebook qui m’a aidé.à traverser la Méditerranée mais nous avons fait naufrage.

Comment cela a-t-il été possible ?

CY : Quand on monte sur le bateau, on choisit une personne pour vous diriger et une personne pour tenir la boussole. Notre bateau n’était pas en bon état et donc nous n’avions pas voulu y monter. Mais les Marocains nous ont fait monter de force en nous tapant. Et au milieu de la mer, le bateau a coulé. Sur 30 personnes au départ, nous sommes restées quelques survivants ici.

Vous êtes coincée au bord de la Méditerranée. Quelles sont vos difficultés à cet endroit ?

CY : Le bord de la mer est un autre monde qui surprend au Maroc. Quand vous êtes des filles, vous dormez dans une maison que vous payez par jour. Mais les hommes dorment dans la forêt. Et ceux qui n’ont pas d’argent sont obligés de mendier. Ils sont obligés de confier leur sort face au destin. Les filles sont exposées à la prostitution.

Que comptez-vous faire maintenant que votre tentative de la traversée a échoué ?

CY : Je compte faire des papiers pour être en règles. Et là où les papiers me permettront d’aller, j’irai. Mais pour l’instant je ne compte pas tenter une autre traversée.

 

Interview réalisée au téléphone par

Coulibaly Chigata L.

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